Récit

Les Sauvageon.ne.s réveillent le lien à la nature en ville

En formant des animateurs et animatrices ‘nature’ par le jeu, le plaisir et l’imaginaire, l’asbl bruxelloise Les Sauvageon·ne·s mise sur un effet démultiplicateur pour toucher un large public urbain, souvent coupé de tout lien avec la faune et la flore. L’association est la quatrième lauréate du Prix du Fonds Creative Bruxsels, géré par la Fondation Roi Baudouin. 

La chenille redémarre. Non loin des étangs de Neerpede, à Anderlecht, une dizaine de personnes avancent en file indienne. Masque occultant sur les yeux, main posée sur l’épaule du voisin de devant, elles suivent un sentier de terre, guidées par Laurence Van Belle et Fanny Pieman, animatrices et formatrices à l’asbl Les Sauvageon.ne.s.

Après quelques minutes d’une cadence hésitante, les participant.e.s sont invité.e.s à s’immobiliser, puis à enlever leur masque. Le paysage se dévoile : une végétation dense et variée, surgissant des eaux calmes d’une des mares qui entoure cet écrin de verdure que sont les étangs de Neerpede, à l’ouest de Bruxelles. « Les mares et les zones humides sont des lieux d’une complexité fascinante, où règne le calme », explique Fanny Pieman.  

Former des animateurs relais

Le groupe participe à une formation intitulée ‘Les petites bêtes de l’air, de la terre et de l’eau’ dans le cadre du projet ‘Animer dehors’ proposé par l’asbl Les Sauvageon·ne·s. Chacun reçoit une petite fiche décrivant une plante typique des zones humides, avec pour mission de la retrouver dans l’environnement. Se dévoilent alors des lentilles d’eau, des iris des marais – qui protègent les berges en les stabilisant – ou encore, des menthes aquatiques. « Ces ateliers permettent de transmettre des savoirs naturalistes de base » , précise Fanny Pieman. « Mais l’objectif de cette formation est ailleurs : il s’agit avant tout de faire vivre des activités éducatives à des adultes relais. Des activités qu’ils ou elles pourront facilement reproduire dans leurs propres animations. »

La formation se déploie en quatre modules de deux à trois jours. Elle s’adresse principalement à des acteurs de première ligne – éducateurs de maisons de jeunes, animateurs d’organisations de jeunesse, travailleurs sociaux… – désireux de proposer à leur public des animations autour du thème de la nature en ville. Les ateliers sont aussi accessibles à de ‘simples’ citoyens, jeunes ou adultes, mus par le désir de proposer une virée ‘nature’ à leur entourage scolaire, professionnel ou familial. 

En formant des animateurs relais, l’asbl espère toucher, par ricochet, un large public urbain qui pourra, à son tour, renouer avec la nature par le jeu, la curiosité et l’imaginaire, dans les parcs et espaces verts de Bruxelles. À son échelle, Les Sauvageon.ne.s tentent de contrer l’idée que la nature, en ville, serait un luxe, surtout dans les quartiers populaires, souvent peu pourvus en espaces verts. « Les publics les plus précaires sont aussi ceux qui ont le moins accès à un environnement végétalisé de manière régulière », déplore Fanny Pieman.

Reconnecter les jeunes avec la nature

Animateur socioculturel au foyer des jeunes des Marolles, Bruno participe à la formation avec enthousiasme. « Ici, c’est hyper concret, cela me donne des outils que je n’avais pas pour mes ateliers, pour aller plus loin. » Souvent, il essaye de « reconnecter les jeunes avec la nature », des escapades en forêt, parfois agrémentées de détours aventureux et de camping sauvage, « mais j’ai parfois l’impression que devant les arbres, les jeunes réagissent comme s’ils étaient face à des boîtes de conserve ». Il manquait donc quelques clés à Bruno pour capter ce public. C’est ce qu’offre Les Sauvageon·ne·s, en travaillant le plaisir de la découverte, le lien avec le monde naturel, parfois microscopique, qui grouille aussi à Bruxelles.

La veille, ces aspirants aventuriers de la nature bruxelloise ont été séduits par l’atelier d’observation d’insectes. Chloé, animatrice pour enfants, a particulièrement apprécié ce moment : « Avant de nous demander, tels des naturalistes, quel était le nom des insectes que nous observions, nous avons « construit » un insecte de notre invention, avec de l’argile, des brindilles, des feuilles. C’est typiquement le genre d’activité qu’on peut facilement adapter avec les enfants. » La pédagogie par la nature, prônée par Les Sauvageon·ne·s, passe par un travail sur la confiance en soi et la coopération avec les autres.

Devant la mare anderlechtoise, Bruno, Chloé et leurs acolytes se saisissent de petites épuisettes. Une partie de pêche peut commencer. Avec une joie enfantine et quelques rires, on extrait de la mare de petites bêtes qu’on plonge dans des bocaux afin de les observer, puis les identifier et les relâcher. Les participant.e.s repèrent un gammare (minuscule crevette d’eau douce), un petit triton, de multiples larves et un dytique qui semble ramer à reculons avec ses fines pattes. Les ateliers sont une occasion d’échanger, par la parole, les regards, le dessin. « Les participants découvrent les bases de l’écologie, mais de manière à donner du plaisir au public », résume Fanny Pieman. 

Le soutien de 10.000 euros associés au Prix du Fonds Creative Bruxsels permet à l’asbl Les Sauvageon·ne·s de poursuivre ses activités. « Une aide bienvenue dans le contexte d’incertitude qui frappe le monde associatif bruxellois », conclut Fanny Pieman.

« Notre objectif est de faire vivre des activités éducatives autour de la nature à des adultes relais. »
Fanny Pieman
asbl Les Sauvageon.ne.s

À propos du Fonds Creative Bruxsels

Géré par la Fondation Roi Baudouin, le Fonds Creative Bruxsels a pour objectif d’être un laboratoire bruxellois du vivre ensemble créatif. Il est dédié au soutien de projets concrets et réalisables, dont l’impact est guidé par l´intérêt collectif sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale.

Le Fonds est axé sur le vivre ensemble, par des actions de terrain renforçant la cohésion sociale et le rapprochement entre Bruxellois.e.s. Chaque année, il remet des Prix à des projets innovants et créatifs au service de l'intérêt général, de la cohésion sociale ou du rapprochement entre citoyen.ne.s. Il est particulièrement attentif à l'originalité, l'innovation, voire l'impertinence, ainsi qu’au caractère reproductible ou à l’effet papillon généré par lesdits projets, dans un esprit qui met en valeur les caractéristiques des Bruxellois.e.s.

Fin 2024, le projet ‘Animer dehors’ des Sauvageon.ne.s a reçu le Prix du Fonds Creative Bruxsels. Le Fonds a également soutenu UMOYA, une association d’aide aux mineurs étrangers non -accompagnés.

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