Récit

Comme chez nous : l'accueil social d'urgence au temps du COVID-19

Face à l'épidémie de coronavirus, les sans-abri sont encore plus fragilisés. Leurs rares ressources s'amenuisent et les services qui leur viennent en aide doivent parfois fermer. Des lieux les accueillent malgré tout. Confrontés à l'augmentation du nombre de bénéficiaires, ils doivent se réorganiser en effectif restreint - une réorganisation qui engendre des coûts. Un appel d'urgence de la Fondation Roi Baudouin permet à des associations de lutte contre la pauvreté et le sans-abrisme de bénéficier d'un soutien rapide de 10.000 euros. Exemple à Charleroi, avec l'asbl Comme chez nous.

L'épidémie de COVID-19 n’épargne personne. Elle frappe aussi brutalement les sans-abri, car de nombreux services d'aide ont fermé leurs portes. C'est le constat que pose Sophie Crapez, directrice de Comme chez nous, dispositif d'aide de jour aux personnes sans-abri, à Charleroi : "Pour l'instant, on sait que des services ferment leur accueil, d'autres ferment complètement, d'autres encore ferment temporairement le temps de se réorganiser. Une chose est sûre : l'accès aux banques alimentaires, aux épiceries sociales, aux services de seconde ligne est très incertain, voire inexistant. Les produits de la mendicité sont réduits à zéro. Les invendus alimentaires ne sont plus distribués. Les difficultés des personnes sans-abri augmentent avec la propagation du virus".

Cette addition de problèmes conduit les plus vulnérables vers les seuls services ouverts, comme le Rebond, le service d'accueil de jour de Comme chez nous, au sein duquel les personnes peuvent souffler un peu, manger, se laver. Le public qui afflue au Rebond est, depuis le déclenchement de l'épidémie, plus nombreux que d'habitude et sa composition évolue aussi. "Davantage de familles avec enfants de moins de dix ans se présentent à nos portes la semaine et davantage de sans-papiers le week-end, mais c’est évolutif", détaille Sophie Crapez.

Se réorganiser

Alors que la demande d'aide est plus importante, l'offre est soumise à une pression beaucoup plus intense, car les services sont, dans le même temps, confrontés à la baisse de leurs effectifs. Trois travailleurs de Comme chez nous sont confinés pour suspicion de coronavirus. D'autres ne peuvent pas être actifs sur le terrain car leurs proches sont de potentiels porteurs du COVID-19. Enfin, la plupart des 60 bénévoles de l'association restent chez eux, confinement oblige. "En gros, la moitié de l'équipe salariée, soit environ 15 personnes, sont activables sur le terrain", témoigne Sophie Crapez.

Il a donc fallu que le Rebond rebondisse et change radicalement ses méthodes de travail. Surtout lorsque l'équipe a appris, aux tous débuts du confinement, qu'un de ses bénéficiaires était potentiellement porteur du COVID-19. "Cela a été un vrai stress au sein de l'équipe. Nous avons dû fermer pendant une journée entière pour nous retourner et repenser notre façon de fonctionner, car nous ne pouvions pas accueillir dans de bonnes conditions autant de monde", reprend la directrice.

Dans un premier temps, la distribution de nourriture s'est faite en extérieur. Aux grands maux, les grands remèdes : le mur de l'association a été percé pour construire une arrivée d'eau afin de permettre aux bénéficiaires de se laver les mains. Une toilette mobile a été installée dans la rue. L'accès aux douches, au sein du bâtiment de l'asbl, a été filtré pour éviter les regroupements, et la température des bénéficiaires était prise grâce à un thermomètre à distance prêté par l'aéroport de Charleroi.

Malgré ces changements radicaux, l'accueil, partiellement de rue, n'était pas optimal, car le bâtiment de l'association, au cœur de Charleroi, n'était pas assez grand. Comme chez nous est donc parti à la recherche d'un local plus vaste permettant d'organiser un accueil sous abri, tout en respectant les consignes de distanciation sociale. "Nous sommes un service d'urgence sociale, nous devons donc créer les conditions pour assurer la continuité sans que les bénéficiaires se contaminent les uns les autres et sans qu'ils contaminent le personnel accueillant", précise Sophie Crapez. Le Rebond a donc délocalisé ses services dans la salle de sport de la commune de Marchienne-Au-Pont, sur le territoire de la commune de Charleroi, qui a accepté de la mettre à disposition.

Des coûts supplémentaires, une aide bienvenue

L'ensemble de ces changements implique des coûts supplémentaires pour Comme chez nous. L'association a dû s'offrir les services d'une société de nettoyage. Comme chez nous doit désormais acheter ses draps et serviettes, son matériel de protection. À cela s'ajoute l'achat de mobilier d'urgence pour la salle de sports. C'est sans compter les achats de savon, le surcoût de la facture d'eau, les achats de nourriture.

D'autres services de Comme chez nous – dont l'objectif est l'insertion sociale du public sans-abri - sont aussi sollicités en ces temps de crise. C'est particulièrement le cas de Chez toit, le service logement de l'asbl, qui revoit ses critères d'aide, comme l'explique Sophie Crapez : "Nous avons identifié une trentaine de personnes particulièrement fragilisées qui devraient bénéficier d'un logement dans le parc que nous gérons. Dans ce contexte de crise, c'est nous qui allons prendre en charge les dépenses – parfois le loyer, ou la consommation de gaz ou d'électricité. Nous ne serons pas regardants quant à la capacité des uns et des autres de prendre en charge tout ou partie de ces dépenses".

"Le soutien a permis de donner un peu d'air à l’association et de faire face aux dépenses les plus urgentes."
Sophie Crapez
Directrice de Comme chez nous

Pour le seul mois de mars, Comme chez nous devrait débourser environ 25.000 euros de plus qu'en vitesse de croisière. Les 10.000 euros obtenus par l'association dans le cadre de l'appel d'urgence lancé par la Fondation Roi Baudouin ont permis de donner un peu d'air à l’association et de faire face aux dépenses les plus urgentes. "J'ai reçu un appel dès le début de la crise au sujet de nos besoins", explique Sophie Crapez, qui souligne "la réactivité et la flexibilité" de la Fondation Roi Baudouin. Une aide plus que bienvenue.

À propos de l’appel d’urgence ‘COVID-19 : personnes précarisées’

Dans le cadre de la crise sanitaire liée au coronavirus, la Fondation Roi Baudouin a lancé rapidement un appel d’urgence destiné aux organisations de lutte contre la pauvreté et le sans-abrisme, au moyen d'une procédure accélérée et allégée. L’objectif est que les publics vulnérables avec lesquels ces organisations travaillent, et qui sont gravement touchés par la crise du COVID-19, puissent continuer à être aidés. Les organisations sélectionnées bénéficient d’un soutien forfaitaire de 10.000 euros. Plus d'infos. Au total, quelque 5 millions d'euros sont octroyés par la Fondation aux acteurs de terrain qui font face à l'urgence en Wallonie, à Bruxelles et en Flandre: 3 millions d'euros aux organisations de lutte contre la pauvreté et le sans-abrisme, et 2 millions d'euros aux organisations de première ligne d'aide et de soins. Plus d'infos.

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Ensemble face au coronavirus : près de cinq millions d’euros de soutien aux organisations qui font face à l’urgence

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