Récit

À Bruxelles, des logements pour apprendre l’autonomie à de jeunes sans-abri

Dans une maison bruxelloise, quatre chambres individuelles accueillent des jeunes en errance. Ils peuvent s’y poser et rebondir. Le Fonds Baronne Monique Van Oldeneel tot Oldenzeel, géré par la Fondation Roi Baudouin, a permis de rénover le bâti en le transformant en un lieu accueillant.

Une grande maison de maître, récemment rénovée, au cœur du quartier du Châtelain, dans la commune d’Ixelles. Aux étages, quatre chambres lumineuses, deux salles de bains et, au rez-de-chaussée, trois pièces en enfilade où s’enchaînent la cuisine, une salle à manger et un salon. Contrairement aux apparences, ceci n’est pas une annonce immobilière. Il est d’ailleurs impossible de trouver ce logement sur annonce. Car cette belle bâtisse, propriété de l’asbl Les Petits Riens, est destinée à accueillir quatre jeunes en situation de sans-abrisme de 18 à 30 ans. « Il y a de plus en plus de jeunes en errance, et très peu de structures qui leur sont dédiées. Ils ont besoin de lieux et d’un accompagnement adaptés », évoque Grégory Pattyn, directeur de la maison d’accueil Prévôt, gérée par Les Petits Riens.

La maison d’accueil Prévôt, c’est une vingtaine de lits en « semi-autonomie » et une grande structure communautaire de 85 places, où se côtoient des jeunes et des adultes. Ces derniers y vivent des situations problématiques souvent plus lourdes et plus ancrées que leurs cadets. « La cohabitation entre des jeunes de 18 – 19 ans et des hommes plus âgés, parfois très abîmés par la vie, qui n’exercent pas toujours une bonne influence, est loin d’être évidente », ajoute Sandrine Mathis, travailleuse sociale en charge de ce nouveau projet destiné aux jeunes.

Le souci, c’est que les structures d’accueil dédiées aux jeunes ne sont pas légion à Bruxelles. Il y a bien les 21 places d’@home, une autre structure des Petits Riens, à Forest. « Mais les demandes sont plus nombreuses que l’offre de places », assure Grégory Pattyn. À Bruxelles, les parcours chaotiques de jeunes en errance sont de plus en plus fréquents. Des jeunes en rupture familiale viennent grossir le nombre de personnes sans-abri. On compte aussi de jeunes adultes esseulés et désorientés au sortir d’institutions de l’Aide à la Jeunesse, ou d’autres encore, atteints de troubles de la santé mentale. « Il est donc nécessaire d’être réactifs et de répondre aux nouvelles réalités sociales », ajoute le directeur. Et c’est bien l’objectif que poursuit l’asbl Les Petits Riens en ouvrant cette structure.

Un lieu pour se reconstruire

Parmi les jeunes en situation d’errance, on trouve aussi des réfugiés qui, malgré leur titre de séjour, n’ont pas le soutien ni les ressources nécessaires pour trouver un logement. C’est cette situation que vit Ahmet, le premier locataire de la maison d’accueil rénovée du Châtelain. Le jeune homme de 23 ans, de nationalité turque, est arrivé en Belgique en 2021, où il a obtenu le statut de réfugié, lui ouvrant un droit au séjour et un accès aux droits sociaux. Après avoir vécu en centre d’accueil pour demandeurs d’asile, Ahmet, qui étudie les technologies de l’informatique et de la communication à Bruxelles, a fait l’expérience de la réalité du marché locatif dans la capitale. « Les logements sont chers, et les propriétaires ne veulent pas louer à des étrangers, encore moins quand ils dépendent du CPAS et qu’ils sont étudiants, dit-il. Quand il n’y a pas de parents pour se porter garants, c’est très compliqué. » Ahmet a donc dû se replier sur la structure communautaire de la maison d’accueil des Petits Riens. Il y a vécu pendant près de dix mois. Sans cela, c’était la rue. Aujourd’hui, il se réjouit de « la vie dans la maison pour jeunes, car je peux y stocker ma nourriture et cuisiner moi-même ».

Le projet est, avant tout, centré sur l’autonomie des jeunes. S’ils sont régulièrement suivis par la travailleuse sociale – dont le panel d’aides est très varié, allant de l’aide administrative aux conseils budgétaires, jusqu’à l’élaboration des menus et l’apprentissage des courses – les jeunes apprennent à se débrouiller seuls. C’est même une finalité du projet, que décrit Grégory Pattyn : « Le but, c’est qu’à la fin des six mois d’hébergement, renouvelables deux fois, les résidents trouvent un logement pérenne. On les accompagne vers un maximum d’autonomie. Ces logements ne sont pas faits pour s’installer dans la durée. Ils sont un passage pendant lequel nous responsabilisons ces jeunes. »

"Les jeunes sans-abri ont besoin de lieux et d’un accompagnement adaptés."
Grégory Pattyn
directeur de la maison d’accueil Prévôt, gérée par Les Petits Riens

L’aide financière du Fonds Baronne Monique van Oldeneel tot Oldenzeel a permis de mener à bien la rénovation du bâtiment, auparavant une maison d’accueil en semi-autonomie pour adultes, et sa division en chambres confortables. Les chambres, le salon, l’espace vert tout au fond, sont autant de lieux pour permettre à ces jeunes, au vécu déjà lourd, de « se poser et de se reconstruire », comme le dit Sandrine Mathis. Avant de rebondir.

A propos du Fonds Baronne Monique van Oldeneel tot Oldenzeel

Le Fonds Baronne Monique van Oldeneel tot Oldenzeel, géré par la Fondation Roi Baudouin, octroie un appui structurel et financier à des associations et entreprises d’économie sociale qui oeuvrent à l’amélioration des conditions de logement et de vie des personnes précarisées en Belgique. Plus d'infos

Par le biais d’appels à projets, le Fonds soutient tant des initiatives plus modestes que des projets d’achat, de rénovation et d’aménagement de logements destinés à accueillir des publics fragilisés en perte de repères, en vue de leur offrir un répit, de leur permettre de renforcer leur autonomie et de se reconstruire. Plus d’infos

A propos des dénombrements du sans-abrisme et de l’absence de chez-soi

Pour la quatrième année consécutive, la Fondation soutient les équipes de recherche de l’UCLouvain (CIRTES) et de la KULeuven (LUCAS) dans la réalisation de dénombrements du sans-abrisme et de l’absence de chez-soi en Belgique. Ceux-ci auront lieu le 20 octobre 2023.

Combinées à des recherches qualitatives, les données recueillies lors des dénombrements permettent aussi de mettre en lumière la situation de publics spécifiques, tels que les jeunes adultes sans-abri et sans chez-soi. Ainsi, d’après les résultats d’une étude menée par l’UCLouvain, l’UGent et la KULeuven à la demande de la Fondation en 2022, il apparaît que près d’un adulte en errance sur cinq a entre 18 et 25 ans. Plus d’infos

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