Récit

Souffler, pour mieux repartir

2025
Pouvoir souffler, quand on est parent d’un enfant différent, ce n’est pas du luxe, c’est vital
Fanny Van De Sype
Coordinatrice de la Villa Indigo

Avoir un enfant différent, cela exige un grand investissement en temps et en énergie. Pour que le couple et la fratrie puissent tenir le coup, des moments de pause sont indispensables. La Fondation Roi Baudouin soutient des projets qui créent des solutions de répit pour les parents d’enfants avec un handicap. Parmi eux, la Villa Indigo, située à Evere (Bruxelles), propose des séjours pédiatriques résidentiels avec prise en charge des enfants par des équipes pluridisciplinaires. Des professionnels au service du bien-être des enfants pour permettre aux parents de souffler quelques jours : un moment de grâce qui ne fait que des gagnants. 

« Vivre avec Asmae, cela demande une vigilance de chaque instant », explique Nadia, sa maman. « La semaine, on a notre routine : Asmae va à l’école, les soirées sont rythmées par les rituels du repas, des jeux et de la mise au lit, bref, le temps passe vite, d’autant que je travaille presque à temps plein. Mais parfois, le week-end, les choses se compliquent, surtout quand nous avons des événements familiaux au programme : Asmae supporte difficilement le bruit, l’agitation, la foule. Depuis que j’ai découvert l’existence de la Villa Indigo, à Evere, je vois venir ces échéances avec beaucoup plus de sérénité : j’envoie un mail à la Villa pour voir si elle peut accueillir notre fille pendant un ou deux jours, et si la réponse est positive, mon mari, mon autre fille et moi-même pouvons participer à la fête l’esprit tranquille. »  

Et, c’est essentiel, sans le moindre sentiment de culpabilité : « quand Asmae nous voit préparer sa valise, elle sait qu’elle va aller à la Villa, et elle se réjouit : c’est fantastique ! Là-bas, les enfants sont très bien encadrés, et tout est fait pour qu’ils s’amusent : ateliers cuisine, promenades, séances de magie, ateliers sensoriels, bricolage, peinture, maquillage, massages, jacuzzi, contacts avec des animaux, etc. Le tout dans un environnement sécurisé, avec un encadrement très pro ». 

Une maladie qui affecte toute la famille 

Asmae, bientôt 13 ans, est atteinte d’une maladie neurologique rare, qui provoque de violentes crises d’épilepsie pouvant survenir à n’importe quel moment, sans crier gare. « En tombant, elle se fait parfois très mal, ou se blesse : nous ne pouvons donc jamais la laisser seule. Même lorsqu’elle se déplace pour aller aux toilettes, elle doit être accompagnée. Pendant les premières années, les crises étaient très sévères, notre fille a dû être régulièrement hospitalisée. Au fil du temps, les crises se sont faites moins graves et plus courtes. Nous avons aussi appris à les gérer, à avoir les bons réflexes, à rassurer notre fille. À partir du moment où nous sommes devenus plus sereins face à la maladie de notre fille, nous avons pu regarder la situation avec un peu plus de recul, et nous nous sommes dit que cela nous ferait du bien, à toute la famille, de pouvoir confier Asmae à d’autres personnes, de temps en temps, pour pouvoir souffler. Il nous a paru aussi important de pouvoir consacrer des moments privilégiés à notre fille aînée (17 ans), dont la vie est évidemment très impactée par la maladie de sa sœur. Bien sûr, nous ne sommes pas les seuls à solliciter la Villa Indigo : pendant les vacances scolaires, la demande explose, et il n’y a pas toujours de places disponibles ». 

Un encadrement professionnel, au service des parents et des enfants 

« C’est ce qui est le plus difficile à gérer pour moi », regrette Fanny Van De Sype, la coordinatrice de la Villa Indigo, qui soufflera bientôt ses quinze bougies : « quand je dois dire aux parents qui rêvent d’un moment de répit qu’il n’y a pas de places pour la période qu’ils sollicitent, et que je dois les mettre sur une liste d’attente, cela me fait vraiment mal au cœur ». Or, chaque année, le taux d’occupation de la Villa augmente de 10 %  : les 10 places disponibles sont donc rapidement affectées, surtout pour les week-ends et les vacances scolaires. « Pendant la période des vacances de détente, de printemps et d’été, chaque semaine, environ 15 familles restent sur le carreau », déplore Fanny. «  Pour pouvoir offrir un moment de répit au plus grand nombre de parents, nous limitons les séjours à maximum un par période de vacances, et pour une durée maximale de sept jours, mais cela ne suffit pas à satisfaire tout le monde ». 

D’autant plus que pour pouvoir accueillir chaque enfant dans de bonnes conditions, il faut constituer un groupe équilibré, composé d’enfants aux tempéraments et aux pathologies compatibles. « Rien n’est laissé au hasard, il faut à la fois penser au bien-être des enfants et à celui de l’équipe qui les encadre, composée d’infirmières et infirmiers, de puéricultrices et d’éducatrices et éducateurs spécialisés : si trop d’enfants affectés par un handicap lourd sont présents en même temps, cela devient impossible à gérer ». 

Le soutien de la Fondation Roi Baudouin qui permit à la Villa Indigo d’augmenter la capacité d’accueil de la Villa Indigo est donc accueilli avec soulagement par ses responsables : « deux chambres supplémentaires, soit deux places accessibles en plus pour chaque période d’accueil, cela reste évidemment insuffisant pour répondre à toutes les demandes, mais cela permettra d’offrir un moment de resourcement à davantage de familles », se réjouit Fanny. « Il faudrait cependant que davantage d’institutions comme la nôtre éclosent un peu partout en Belgique : pouvoir souffler, quand on est parent d’un enfant différent, ce n’est pas du luxe, c’est vraiment vital  ». 

 

 

 

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