
Quand la danse transcende le handicap visuel
L’école de danse DanceOrientation a été la première, en Flandre, à accueillir des élèves aveugles et malvoyants. Aux côtés de partenaires voyants, ils s’adonnent à la salsa, la bachata ou la kizomba. Une histoire forte et inclusive intitulée #danceisblind. Michèle Martens, fondatrice de l’école, a voulu aller encore plus loin : grâce au soutien de la Fondation Roi Baudouin, elle a créé www.danceorientation.eu, une plateforme qui rassemble des connaissances et des informations dédiées à la pratique de la danse pour les personnes aveugles et malvoyantes.
« L’école de danse existe depuis 2010 », entame Michèle Martens. « Nous y proposons une grande variété de danses, allant du ballet classique à la pole dance, en passant par de nombreuses danses de couple. Ce qui fait notre particularité, c’est que nous comptons 70 G-sportifs parmi nos membres, à savoir des personnes avec un handicap, une vulnérabilité psychique ou une maladie chronique. Actuellement, 24 d’entre eux suivent des cours régulièrement. Quand on sait combien de personnes souffrent de déficience visuelle, je trouve incompréhensible qu’elles aient si peu d’opportunités de danser. DanceOrientation s’engage donc dans la sensibilisation ».
Manuel Delaere, l’un des élèves aveugles, est membre de l’école depuis environ cinq ans. « Je cherchais une école de danse qui tienne compte de mon handicap », explique-t-il. « Grâce à G-Sport Vlaanderen, j’ai découvert l’école de Michèle. La danse m’aide énormément à créer des liens et rencontrer des gens ».
L’inclusion, un choix
« En tant qu’école de danse ou club sportif, l’inclusion est un choix », affirme Michèle Martens. « Cela fait des années que nous semons des graines. Les choses bougent, mais trop lentement. Notre école de danse est maintenant reconnue comme club G-sport durable par Sport Vlaanderen, l’agence publique flamande en charge de la politique sportive en Flandre. La Commission communautaire flamande est aussi un partenaire important. Nous avons également été le premier club sportif en Belgique à collaborer avec l’Uitpas (permettant l’accès à un tarif social, ndlr) ».
Les démonstrations et les spectacles sont des moments clés pour l’école de danse, qui participe aux Fêtes de Gand depuis 2010. « Les scènes m’aident beaucoup à gagner en confiance », confie Manuel. « Sur le plan technique, je me sens beaucoup plus à l’aise. La salsa est ma danse préférée parce qu’elle est assez technique. Je suis ingénieur, donc ça me correspond bien. C’est comme une montre suisse : tout doit être parfaitement réglé ! ».
Manuel est actuellement en formation pour devenir professeur de danse, avec la volonté de lever davantage de barrières pour les personnes malvoyantes. En tant qu’expert par son vécu, il parvient à donner des instructions que ses élèves aveugles ou malvoyants comprennent plus facilement. Il enseigne même la danse à des personnes voyantes, prouvant que la passion et la technique transcendent toutes les différences.
« Cela apporte une grande valeur ajoutée à mes autres élèves en situation de handicap », poursuit Michèle. « Pour nous, l’inclusion est une évidence. Nos cours de danse sont mixtes, mais la danse est toujours inclusive : jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, issus ou non de l’immigration… La danse transcende les différences. En réalité, nous avons même besoin des personnes en situation de handicap pour réinventer la danse et créer de nouvelles formes d’expression artistique. Notre mission est de prouver que le sport inclusif est toujours possible, et qu’il peut même enrichir la pratique pour tous ».
Créer de la liberté par la danse
Michèle a pour objectif d’offrir un maximum de liberté aux personnes avec un handicap. Nadine Pollet, qui a perdu la vue à l’âge adulte, comme Manuel, témoigne : « Grâce à la danse, j’élargis mes contacts sociaux et, par conséquent, mon univers. La danse est un moyen de me sentir libre. C’est une activité que je peux pratiquer sans avoir forcément besoin de voir ».
Du côté des élèves valides, le handicap n’est pas perçu comme un frein. « Au contraire, c’est un atout », déclare Chantal Dewever, élève sans handicap physique. « Nous dansons dans un système d’échange. Avec un partenaire aveugle, je ressens la danse différemment. Je fais davantage attention à ma posture et j’en apprends beaucoup. En plus, nous formons un chouette groupe où tout le monde se connaît. Cette amitié et cette bienveillance sont une réelle valeur ajoutée ».
L’appel à projets Handicap visuel & Inclusion de la Fondation Roi Baudouin correspondait parfaitement à DanceOrientation. « Avec le premier soutien reçu en 2023, nous avons créé notre plateforme numérique », explique Michèle. « Cela nous a permis de multiplier les représentations et de développer de nouveaux pédagogiques, comme les barres de ballet ou un tableau magnétique. On place les pieds dans des figures successives, ce qui permet de travailler l’orientation et la distance entre les pas grâce au toucher ».
Plateforme pédagogique et didactique
La suite logique, selon Michèle : développer une pédagogie spécifique autour de la danse et du mouvement pour les personnes aveugles et les malvoyantes. « Les élèves reçoivent notamment une boîte contenant des planches illustrant la position des pieds, représentant le parcours de danse. Ils peuvent ainsi s’exercer à la maison. Grâce au soutien financier de la Fondation Roi Baudouin accordé en 2024, nous numérisons désormais nos connaissances. Nous transcrivons les danses et les mettons en ligne sous forme audio. La plateforme de connaissances est accessible à tous : danseurs, écoles, universités, fédérations, organismes sportifs… »
« En tant qu’école de danse ou club sportif, l’inclusion est un choix »
Pour Michèle, le soutien de la Fondation Roi Baudouin est inestimable. « Compte tenu de l’importance sociale et de la réputation de la Fondation en Belgique, son soutien à notre projet est crucial. En trois ans, grâce à la Fondation Roi Baudouin, beaucoup de choses ont changé pour DanceOrientation. Nous sommes désormais beaucoup plus (re)connus et respectés. Et grâce à l’implication de nos membres non-voyants, nous continuons à évoluer. »
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