
L’expérience à l’origine du rôle d’agent de liaison en Afrique
Ancien lauréat du KBF Prix Afrique et partenaire de longue date de la Fondation Roi Baudouin, Deogratias Niyonkuru est l’inspirateur d’un nouveau rôle dans les pays d’Afrique prioritaires pour l’action de la Fondation : celui d’agent de liaison. En RD Congo, au Sénégal, au Bénin, et au Burundi, d’autres ont aujourd’hui pris le relais. Deogratias Niyonkuru retrace l’histoire d’une fonction essentielle à l’identification, au soutien et à l’accompagnement des partenaires locaux.
À quelle occasion avez-vous rencontré la Fondation Roi Baudouin ?
« Adisco, l’association que j’ai fondée en 2006, travaille sur la construction de mouvements sociaux et soutient des mouvements coopératifs ou mutualistes. Nous avions l’ambition de créer un mouvement de jeunes entrepreneurs, et, en 2012, un appel à projets de la Fondation Roi Baudouin, justement à leur destination, dans la région des Grands Lacs, a attiré notre attention. Nous avons postulé avec un petit projet d’accompagnement des jeunes dans la culture des fruits et avons été sélectionnés. Avant cela, je ne connaissais pas la Fondation, je la prenais pour un bailleur de fonds comme les autres. Ce n’est que progressivement que j’ai compris que ce n’est pas une organisation de développement ‘classique’ – la philanthropie, c’est autre chose. J’étais habitué au suivi-évaluation exigé par les acteurs habituels de la coopération internationale. Or, ici, il n’y avait pas de canevas de reporting extrêmement complexe imposé. La Fondation travaille plus en souplesse, en adaptation. Nos projets ont grandi, et ce financement de la FRB a permis de les crédibiliser, de mobiliser d’autres bailleurs de fonds autour de la formation des jeunes. En 2015, nous avons d’ailleurs reçu le KBF Prix Afrique (NDLR : Prix qui récompense tous les deux ans une organisation africaine qui contribue à améliorer durablement la vie des populations en Afrique). »
Comment est née l’idée d’un relais sur le terrain ?
« Je ne travaillais plus pour Adisco, j’étais devenu conseiller stratégique en développement pour différentes organisations. La Fondation Roi Baudouin cherchait un relais, au départ par rapport à la filière café, dans lequel régnait un certain imbroglio, et j’étais parmi les personnes les mieux placées pour comprendre ce qu’il s’y passait. J’avais déjà travaillé sur des thématiques très diversifiées, également au Cameroun et en RDC, j’avais donc des connaissances dans un très large spectre d’aspects du développement rural. Dans un premier temps, je n’avais pas de cahier des charges, ma mission était basée sur la confiance. Même le titre du poste a évolué : j’étais d’abord conseiller local, consultant pour des missions précises, puis je suis devenu agent de liaison. »
Quelles sont les responsabilités liées à cette fonction ?
« L’agent de liaison doit garder les yeux ouverts, détecter les initiatives intéressantes dans l’un des secteurs concernés par la Fondation, et faire remonter des propositions au comité de gestion, à Bruxelles, chargé des décisions. Cela exige énormément d’intégrité - certains voient en vous un bailleur de fonds (ce que vous n’êtes pas !) et j’ai même connu des tentatives de corruption.
L’un des facteurs les plus importants pour sélectionner un projet est l’engagement des gens qui le portent, leur passion pour le travail qu’ils veulent réaliser. C’est certainement le meilleur signe que c’est leur initiative et qu’ils vont la faire vivre.
L’agent de liaison suit ensuite les projets financés, conseille, accompagne, leur rend visite plusieurs fois. C’est la partie que j’appréciais le plus. On rencontre des personnes dynamiques, auxquelles on peut apporter une aide qui les renforce. Il y a également une fonction de vérification : si les moyens ne sont pas utilisés à dessein, on le sent, on pose des questions... et on le rapporte alors à la Fondation, qui décide d’arrêter ou d’envoyer un auditeur. L’agent doit faire preuve de courage, si nécessaire, en dénonçant d’éventuels travers. En Afrique, on est souvent assez complaisant, or il ne faut pas l’être. Cela fait aussi de vous une cible, il faut l’assumer. Il est facile de vous accuser de favoritisme, de tribalisme... Il faut documenter les faits, s’appuyer si possible sur des chiffres, etc. »
Quelles sont les qualités nécessaires pour occuper une telle fonction ?
« Sans hésiter, la qualité essentielle c’est l’intégrité. Il s’agit, mine de rien, d’un travail complexe. Ensuite, il faut de la curiosité. Être ouvert au monde du développement, participer aux débats sur ces questions, recueillir des infos, avoir une grande capacité d’écoute pour entendre les communautés, voir comment elles perçoivent leur environnement économique, politique. Il faut être vraiment pluridisciplinaire, avoir une réelle expérience de terrain et maîtriser les questions de suivi/évaluation. »
« Il faut de l’intégrité et de la curiosité. »
À propos des agents de liaison en Afrique
Inspirée par l’expérience de Deogratias Niyonkuru, la Fondation Roi Baudouin a développé le rôle d’agent de liaison dans les pays d’Afrique les plus concernés par son programme International. La Fondation compte désormais cinq agents en RD Congo, au Sénégal, au Bénin, et au Burundi. Lisez l’article complet ‘Un relais essentiel pour le soutien aux projets en Afrique’, paru dans notre magazine Champs de vision (printemps 2025).
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