La nouvelle vie des cheveux coupés
Aux quatre coins de la Belgique, l’asbl Dung Dung collecte des cheveux coupés. Ces cheveux, récupérés chez des coiffeurs partenaires, serviront de matière première pour absorber des hydrocarbures en cas de pollution de rivière. Ce projet, baptisé Hair Recycle, permet de valoriser des déchets et de protéger l’environnement. Il est soutenu par le Fonds ING pour une Économie plus Circulaire, géré par la Fondation Roi Baudouin.
"Ici, on recycle vos cheveux !". L’inscription, étonnante, est collée sur la vitrine de Modul’hair, salon de coiffure à Genappe, tenu par Catherine Clément. "J’ai jusqu’à 70 kilos de cheveux coupés par an", explique-t-elle. "Je remercie mes clients de ‘faire don’ de cette super matière première !" Après chaque coupe, Catherine Clément ramasse méticuleusement les cheveux de ses clients et les dépose dans un sac en papier craft, au lieu de les jeter.
Le geste semble anodin, mais il s’inscrit dans un mouvement plus vaste où le cheveu coupé n’est plus considéré comme un déchet, mais comme une matière recyclable aux propriétés impressionnantes et aux applications multiples. Ici, à Genappe, les cheveux devraient servir de matière absorbante pour juguler les pollutions hydrocarbures dans les rivières des environs. Des tests sont en cours, en partenariat avec le contrat de rivière Dyle-Gette.
En Belgique, plus de 450 coiffeurs, comme Catherine Clément, ont décidé de participer à Hair Recycle. Ce projet est né en plein confinement à l’initiative de Patrick Janssen, créateur d’entreprises dans des domaines variés, qui souhaitait se lancer dans une nouvelle aventure, en quête d’impact environnemental. "Avec Hair Recycle, il s’agit de valoriser les déchets et de s’inscrire pleinement dans les valeurs de l’économie circulaire", explique-t-il. À ce titre, il bénéficie d’un soutien de 25.000 euros du Fonds ING pour une Économie plus Circulaire.
Boudins anti-pollution
Hair Recycle trouve ses origines en Californie, où l’association Matter of trust recycle les cheveux, les poils et la fourrure pour leur donner une seconde vie. Une trentaine d’associations de par le monde, dont Hair Recycle, suivent ce sillon creusé aux États-Unis, dès 1998.
L’idée est simple : les cheveux coupés sont tassés dans un sac. Les sacs sont ensuite collectés par Patrick Janssen, ou par l’un des six bénévoles de l’association, puis stockés à Waremme ou conduits à l’entreprise de travail adapté Apac, située à Manage. Des cheveux de toutes couleurs et de tout style y sont mélangés et tissés en carpettes de deux centimètres d’épaisseur, puis glissés dans des textiles et assemblés sous la forme de ‘boudins’ de trois mètres de long sur 20 centimètres de large.
"Ces boudins serviront à traiter des pollutions aux hydrocarbures", explique Patrick Janssen. "Car le cheveu est lipophile : il absorbe le gras. Un kilo de cheveux peut absorber huit litres de pétrole." Les propriétés absorbantes du produit final de Hair Recycle ont été testées par le laboratoire Celabor, à Herve. "Nos boudins absorbent quasiment aussi bien les hydrocarbures que les boudins classiques en polypropylène, fabriqués à partir de dérivés de pétrole", ajoute le fondateur de Hair Recycle.
Des applications multiples
Les fameux boudins chevelus, on les verra bientôt serpenter autour de la Dyle. Le Contrat de rivière Dyle-Gette, dont la mission est de restaurer la qualité de l’eau, est séduit par la démarche de Patrick Janssen. "Chaque semaine, au moins une pollution aux hydrocarbures nous est signalée", regrette Isabelle Delgoffe, chargée de mission au Contrat de rivière, dont le territoire d’action couvre 24 communes et 1.000 kilomètres de cours d’eau. Des cuves à mazout qui fuient, des accidents de la route et leurs rejets d’essence, des huiles de vidanges jetées sauvagement... Les motifs de pollution sont très nombreux.
Les hydrocarbures , absorbables, flottent en surface. Ce sont en général les zones de secours, puis les communes qui interviennent pour y mettre un terme, en collaboration étroite avec les Contrats de rivière. "Aujourd’hui, le produit qui permet l’absorption est synthétique", explique Isabelle Delgoffe. "La question est : qu’en fait-on après ? Notre objectif est de valoriser le déchet comme une ressource - ce qui sera possible avec les boudins de Hair Recycle."
Car ces nouveaux déchets – des cheveux gonflés d’hydrocarbure – pourront à leur tour se muer en matière première. Les boudins seront ouverts afin d’en extraire le mazout. Les cheveux et le textile enveloppant seront séchés puis confiés à Holcim, un fabricant de béton, "car les cheveux ont aussi comme caractéristique de renforcer le béton", ajoute Patrick Janssen. Cerise sur le gâteau, ce sont les hydrocarbures puisés dans les rivières qui alimenteront les fours utilisés dans la production de béton. La boucle sera ainsi bouclée.
L’un des grands défis de Hair Recycle est logistique : il faut sillonner la Belgique pour récupérer les tonnes de sacs à cheveux. Le soutien du Fonds ING pour une Économie plus Circulaire a permis de mettre en œuvre les premières tournées de ramassage en couvrant les frais de transport et le défraiement des bénévoles. L’asbl Dung Dung cherche à présent à optimiser ces déplacements, pour ne pas ajouter une pollution inutile liée aux trajets en voiture. "Nous nous appuyons notamment sur des volontaires qui travaillent dans la logistique ou la livraison", précise Patrick Janssen. Lorsque ces ‘livreurs’ passent dans un secteur où se situent des coiffeurs partenaires, ils en profitent pour aller ramasser les sacs de cheveux. Par ailleurs, l’association a lancé une étude pour réduire les émissions de CO2 lors de ses trajets à travers la Belgique.
La masse de cheveux récoltés ne servira pas qu’à contrer les pollutions aux hydrocarbures ; d’autres utilisations sont à l’étude. Les cheveux sont parfois utilisés comme onguents pour les peaux brûlées, ou pour leurs propriétés résistantes, dans les textiles. L’éventail des possibilités est immense. La revanche des cheveux coupés a commencé.
À propos du Fonds ING pour une Économie plus Circulaire
Géré par la Fondation Roi Baudouin, le Fonds ING pour une Économie plus Circulaire est l’un des Fonds via lesquels ING Belgique contribue à différentes thématiques sociétales, à côté du Fonds ING pour une Société plus Digitale, du Fonds pour l’Éducation Financière et du Fonds ING pour des Bâtiments Durables. Depuis 2005, 687 projets ont été soutenus par les Fonds auxquels ING contribue, pour un total de plus de 9 millions d’euros.
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