Toilettes à l’école : (re)penser les lieux pour assurer leur accès maximal à tous les élèves
Alors que les élèves de la Fédération Wallonie-Bruxelles reprendront prochainement le chemin de l’école, la Fondation Roi Baudouin rend publics les résultats d’une étude réalisée à l’initiative du Fonds BYX, posant notamment la question de la distinction filles/garçons des toilettes scolaires. Si dans près de 7 écoles sur 10, cette séparation reste la norme, la mixité des toilettes pourrait favoriser l’égalité entre les sexes, améliorer le bien-être de tous les élèves et rendre ces lieux d’aisance plus accessibles à toutes et tous. Un enjeu propice à la réflexion au sein des établissements scolaires : d’après l’étude, seul 1 élève sur 2 se rend aux toilettes quand il en ressent le besoin. La thématique des toilettes à l’école sera par ailleurs au cœur d’un symposium organisé par le Fonds BYX et destiné à l’ensemble des acteurs de la communauté éducative le 19 novembre prochain.
La question des toilettes à l’école est encore trop souvent un sujet tabou. Depuis 2013, le Fonds BYX, géré par la Fondation Roi Baudouin, agit pour aider les établissements scolaires de la Fédération Wallonie-Bruxelles à rendre leurs sanitaires accueillants et à en faire des lieux dans lesquels les élèves peuvent trouver sécurité, confort, hygiène et intimité. Plus de 400 écoles du fondamental et du secondaire ont ainsi déjà bénéficié d’un soutien du Fonds, pour un total de près de deux millions d’euros, en partie grâce à une collaboration avec la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Des questions inédites se posent aujourd’hui à propos du ‘genre’ des toilettes scolaires. Afin d’y apporter des réponses, le Fonds BYX lançait, fin 2023, une vaste enquête à laquelle ont répondu 2.893 personnes. En outre, 57 d’entre elles ont participé à des entretiens approfondis. Les résultats permettent de dresser un état des lieux des pratiques et des opinions de l’ensemble de la communauté scolaire, grâce au recueil d’avis d’enseignants, de parents, d’élèves et d’anciens élèves sur le principe de (non-)mixité des toilettes scolaires, mais aussi sur ce qui améliore le sentiment de bien-être en la matière. Des recommandations en sont issues afin d’aider les écoles à repenser leurs installations sanitaires.
Des toilettes séparées pour les filles et les garçons : la norme
Dans 69 % des écoles, les toilettes des filles sont distinctes de celles des garçons – une règle intégrée par les élèves, avec 89 % d’entre eux déclarant respecter cette séparation. Mais qui transgresse ? Et pourquoi ? La question du genre aux toilettes divise.
- La majorité (61 %) des répondants se déclarent en défaveur de la mixité des toilettes – un chiffre qui grimpe à 65 % chez les élèves. Pour les adultes, cette opposition repose sur des convictions profondes, souvent inflexibles. Chez les élèves, ce sont davantage les préjugés qui sont à la manœuvre : mixité rimerait avec perte de sécurité et d’intimité, risque d’agressions sexuelles, incompatibilité avec certaines religions et cultures… et conduirait à un évitement accru des toilettes par les filles et une dégradation de la propreté des lieux.
- Pour autant, 29 % des répondants se déclarent favorables à la mixité des toilettes – un chiffre qui tombe à 20 % chez les élèves. Pour les adultes, la mixité représente une action concrète en faveur de l’égalité filles/garçons et de l’inclusion entre genres. Les élèves favorables à la mixité sont principalement ceux ayant déjà expérimenté les toilettes mixtes dans leurs écoles, les personnes se déclarant LGBTQIA+ et les garçons.
Mixité : quelles formes et quels apports ?
Mixité et intimité sont loin d’être antagonistes. De même, différentes solutions progressives sont possibles : cabines individuelles pour celles et ceux qui éprouvent un plus grand besoin d’intimité, blocs genrés persistant à certains endroits de l’établissement scolaire… toutes les variantes sont possibles dans l’objectif d’augmenter la sécurité, l’intimité et le confort de ces lieux indispensables.
Parmi les avantages perçus des toilettes mixtes, les réponses mentionnent notamment un accès facilité, réduisant les temps d’attente souvent plus importants dans les toilettes des filles. L’enjeu est d’autant plus crucial que l’accès aux toilettes dans les écoles devient de plus en plus restreint avec l’avancée en âge : d’une grande liberté en maternelle à des limitations, voire des interdictions, en secondaire. Avec, comme conséquences, des répercussions sur la santé des élèves (infections urinaires, troubles de la miction, constipation, déshydratation…), sur leur concentration en classe et, plus globalement, sur leur bien-être à l’école.
D’autres avantages de la mixité incluent une amélioration du bien-être des élèves appartenant à certaines minorités, grâce à une reconnaissance symbolique de leur identité et une diminution des violences ou des craintes d’agression à leur encontre. La mixité des toilettes contribue également à un meilleur respect des lieux et favoriserait la cohésion et l’égalité entre les élèves.
Recommandations
L’enquête conclut par des recommandations destinées aux écoles envisageant de ‘dégenrer’ leurs toilettes. Point de départ : une réflexion globale sur la culture au sein de l’établissement. Les élèves sont-ils sensibilisés à la problématique générale des toilettes ? Sont-ils impliqués dans les projets et prises de décision ? Existe-t-il une volonté d’égalité entre les élèves ? Y a-t-il un climat de confiance ? … Des facteurs clés de succès sont également identifiés. Ainsi, les aménagements doivent être adaptés aux besoins d’intimité, de sécurité et de confort des élèves, aux exigences accrues par la mixité et au contexte spécifique de chaque école. L'instauration d'une culture inclusive au sein de l'école, favorisant l'égalité entre les élèves, l'implication de tous et la lutte contre certains tabous, est également un élément déterminant.
Symposium
La thématique des toilettes à l’école sera au cœur d’un symposium organisé par le Fonds BYX le 19 novembre 2024, à l’occasion de la journée mondiale des toilettes et des 10 années d’existence du Fonds. La matinée donnera entre autres la parole à Pascale Garnier, maîtresse de conférence à l’université Paris 8 et co-auteur du livre ‘Les « petits coins » à l’école : genre, intimité et sociabilité dans les toilettes scolaires’. L’après-midi sera consacrée à des échanges en ateliers et se clôturera par un panel de discussion en présence, notamment, de Solayman Laqdim, Délégué général aux droits de l’enfant.
Programme complet et inscriptions via ce lien.
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